Prisme cognitif et échelle cognitive

Notre prisme cognitif façonne notre perception du monde et influence directement la qualité de nos décisions – qu’elles soient heureuses… ou malheureuses.

Sommes-nous vraiment rationnels ?

À première vue, nous aimons penser que nos jugements sont objectifs. Pourtant, de nombreuses recherches en psychologie cognitive et en neurosciences montrent que nos raisonnements sont souvent biaisés. Nous interprétons la réalité à travers un filtre composé de nos croyances, émotions, valeurs, expériences passées, attentes et états internes. Ce filtre, notre prisme cognitif, agit en grande partie de manière inconsciente.

En pratique, ce prisme influence autant notre vie professionnelle que personnelle : il affecte nos décisions, nos relations et notre bien-être.

La cognition : un processus en plusieurs dimensions

La psychologie cognitive contemporaine, notamment illustrée par les travaux de Daniel Kahneman (Prix Nobel d’économie 2002), s’intéresse aux processus de traitement de l’information : raisonnement, mémoire, apprentissage, langage, émotions, motivations, et même physiologie (via les marqueurs somatiques). Aujourd’hui, ces mécanismes sont intégrés dans des champs variés : neurosciences, IA, big data… (ex : IBM Watson).

Les trois vagues cognitives

L’évolution des approches cognitives peut être synthétisée en trois grandes étapes :

  1. 1ʳᵉ vague – Comportementale (behaviorisme) : changer les comportements observables.

  2. 2ᵉ vague – Cognitive et humaniste : modifier nos schémas de pensée et mieux comprendre le patient et ses interprétations mentales. Ainsi, elle s’intéressa à la « boite noire », à ce qu’il se passe dans notre cerveau pour gérer l’information (stimulus / réaction).

  3. 3ᵉ vague – Acceptation & engagement : apprendre à accueillir nos pensées et émotions avec souplesse, plutôt que les combattre. C’est la flexibilité situationnelle.

Une 4ᵉ vague serait à souhaiter : plus systémique, intégrative (Edgar Morin), moins centrée sur la mesure et plus ouverte à la complexité humaine.

Le coaching : une approche orientée solutions

Inspiré de la psychothérapie, le coaching se distingue par son ancrage dans l’action. Il vise la définition d’objectifs opérationnels, la construction de solutions concrètes et l’intégration du changement dans le quotidien professionnel ou personnel.

Le traitement de l’information

Une approche cognitive des comportements relationnels

La partie visible de nos interactions se manifeste par nos styles de management, nos dynamiques de couple ou la cohésion d’équipe. Il s’agit de la composante comportementale, observable. Mais elle repose sur une base plus profonde : nos capacités cognitives relationnelles, construites à partir de la façon dont nous percevons, traitons et utilisons l’information.

Stimulus et réaction : le cycle d’entrée cognitive

Dans le langage scientifique, toute information entrante est appelée stimulus. Elle peut être :

  • Externe : un geste, une parole, une urgence, un changement de situation, un bruit, etc.

  • Interne : une douleur, un taux de sucre sanguin, ou même une pensée intrusive ou récurrente.

Notre cerveau traite des millions de données chaque seconde, principalement de façon automatique. Chaque stimulus — perçu consciemment ou non — provoque une réaction. Notons qu’une non-réaction observable reste une forme de réaction : ignorer une situation est un choix comportemental.

Émetteur / Récepteur : une logique de transformation

Dans tout échange relationnel, il existe un émetteur et un récepteur. L’information transmise passe par deux phases :

  1. Une phase observable, verbale et non verbale.

  2. Une phase cognitive, invisible, où le message est interprété.

C’est cette deuxième phase qui nous intéresse. Elle est influencée par nos croyances, nos valeurs, nos besoins, nos expériences et notre état émotionnel du moment.

Le modèle des 101 : les pertes cognitives dans la communication

Ce modèle décrit les différentes pertes d’information qui surviennent dans un processus de communication.

  1. Intention vs Expression : L’émetteur ne dit pas toujours exactement ce qu’il pense (perte estimée à 20%).

  2. Perception par le récepteur : L’accueil de l’information varie selon l’attention, l’humeur, le contexte (encore 20%).

  3. Traitement cognitif : La façon dont le récepteur traite le message est influencée par ses biais, croyances, etc. (20%).

  4. Utilisation du message : La décision de répondre ou non et la façon de le faire (encore 20%).

  5. Feed-back : Enfin, l’expression du retour du récepteur au message initial émet à nouveau avec pertes (dernier 20%).

Au final, il ne reste parfois qu’1 % de l’information initiale clairement reçue et exploitée comme prévu.

 

Le modèle des 101 implique que 81 % du flux d’information dépend de nous

Cela souligne à quel point notre propre fonctionnement cognitif conditionne la qualité des relations.

Trois fonctions du traitement cognitif

Les étapes 2, 3 et 4 ci-dessus correspondent au traitement cognitif de l’information.

  1. Accueil de l’information : dépend de l’attention, de la vigilance, de l’ouverture d’esprit.

  2. Traitement de l’information : repose sur nos capacités d’interprétation, de raisonnement, de projection.

  3. Utilisation de l’information : aboutit à une décision, consciente ou non, et à un comportement observable.

L’échelle cognitive mesure les biais de notre prisme cognitif

Ainsi l’échelle cognitive mesure 2 biais fondamentaux, à chacune des 3 étapes de la gestion de l’information, qui va influencer fortement nos raisonnements, nos prises de décisions et notre comportement.

L’échelle cognitive : 6 biais dans le traitement de l’information

Pour mieux comprendre ces distorsions, l’échelle cognitive distingue 6 filtres majeurs :

 

1. Accueil de l’information

  • 1 – Estime de soi / des autres : image que nous avons de nous et des autres. Cette estime peut être évaluée avec la position de vie de l’AT (Ok+-/OK+-).

  • 2 – Etat d’esprit : fixe ou évolutif (Carol Dweck). Le LOC, le besoin de clôture, ou d’évaluation sont des bons tests pour mesurer en partie cet état d’esprit.

L’accueil de l’information

dépend en grande partie de l’estime de soi et de l’état d’esprit du moment. Ces deux éléments conditionnent la manière dont nous portons attention à ce qui nous entoure et influencent notre capacité à nous ouvrir aux signaux extérieurs. L’estime de soi, en particulier, détermine si nous nous sentons légitimes à recevoir l’information : avons-nous le sentiment d’avoir notre place dans l’échange, dans le groupe, dans le monde professionnel ou personnel ? L’état d’esprit, quant à lui, façonne notre posture mentale : sommes-nous dans une dynamique d’ouverture, prêts à apprendre et à évoluer, ou bien dans une attitude figée, où toute information est filtrée à travers des certitudes établies ? En somme, la question centrale « Ai-je ma place ? » résume l’interaction entre ces deux dimensions fondamentales qui filtrent, dès le départ, la qualité de l’accueil de l’information.

2. Traitement de l’information

Le traitement de l’information

est fortement influencé par notre style d’attachement (théorie de Bowlby) et notre flexibilité cognitive. Une personne à l’attachement sécurisant sera plus à même de réguler ses émotions, d’interpréter les intentions d’autrui avec justesse, et d’évaluer les situations de manière équilibrée. À l’inverse, un attachement insécurisant (évitant ou anxieux) peut biaiser la lecture de la réalité, par sur-contrôle ou hypersensibilité. En parallèle, notre capacité de lâcher prise et de reformuler une situation sans s’y figer conditionne notre adaptabilité. Ensemble, ces dimensions répondent à deux questions essentielles dans l’interprétation d’un message : « Ai-je de la valeur ? » et « Qui a le contrôle ? ». Ces perceptions inconscientes façonnent notre manière de traiter l’information, d’en évaluer les enjeux et d’y répondre.

3. Utilisation de l’information

  • 5 – Compétences émotionnelles : elles influencent directement notre capacité à prendre des décisions, à interagir efficacement avec autrui, à nous adapter à des environnements complexes ou stressants.

  • 6 – Assertivité / Authenticité : capacité à affirmer ses besoins tout en respectant autrui. Evaluer votre affirmation

L’utilisation de l’information,

dernier maillon du processus cognitif, dépend de notre impulsivité, de notre assertivité et de nos compétences émotionnelles. Une personne impulsive réagira souvent sans filtrer, sur la base d’émotions brutes ou de schémas réflexes, là où une assertivité développée permet d’exprimer ses besoins de manière claire, respectueuse et assumée. De même, les compétences émotionnelles — telles que la régulation, la conscience de soi ou l’empathie — influencent notre capacité à agir en cohérence avec nos valeurs plutôt que sous la pression émotionnelle ou sociale. Ensemble, ces qualités permettent de répondre de façon nuancée aux questions : « Suis-je ouvert ? » et « Suis-je authentique ? ». Elles déterminent si nous engageons une action par alignement personnel ou par réflexe défensif.

Exemple d’application

Prenons deux profils :

  • Profil idéal : Estime saine, ouverture d’esprit, flexibilité, assertivité, ancrage dans l’ici et maintenant. Ce profil minimise les distorsions.

  • Profil en tension : Estime surévaluée, rigidité mentale, contrôle fort, faible empathie. Ce profil traite l’information avec un fort biais d’interprétation.

Conclusion

Le prisme cognitif représente la gestion de l’information et les distorsions que notre cerveau au sens large (corps et esprit) peut appliquer à l’information. L’échelle cognitive reprend 3 niveaux de gestion de l’information et les biais qui peuvent en découler (conscients ou inconscients).

L’échelle cognitive ne se veut pas exhaustive. L’objectif est de cibler des stratégies comportementales observables et des croyances qui peuvent facilement dans notre quotidien nous rendre subjectifs, partiaux et entacher nos prises de décisions.

Qu’il s’agisse de notre leadership, de nos relations d’équipe, ou de notre vie personnelle, nos distorsions cognitives nous accompagnent. À nous de les reconnaître pour nous ajuster avec conscience.

Le modèle des 101 nous rappelle que 81 % du traitement de l’information repose sur nous. Dès lors, l’amélioration de nos compétences relationnelles passe avant tout par une meilleure gestion de notre monde intérieur.

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